Il y a des gestes que nous faisons chaque jour sans y prêter attention.
Manger. Marcher. Écouter. Parler. Et puis, parfois, une expérience vient tout bouleverser. Elle révèle ce que nous ne voyions plus. Elle nous rend plus vivants.
C’est ce que j’ai vu se produire à plusieurs reprises lors de mes ateliers, grâce à un exercice que je propose avec humilité, en m’inspirant du psychiatre Christophe André. Il s’agit de l’observation attentive… d’un simple grain de raisin sec.
Le grain de raisin : l’extraordinaire dans l’ordinaire
L’exercice de Christophe André consiste à prendre un petit grain de raisin sec, à le regarder, le toucher, le sentir, l’écouter même — puis à le goûter avec une présence totale.
Ce qui pourrait sembler anecdotique devient soudain une révélation.
Des participantes me confient souvent, un peu interloquées :
« Je n’avais jamais goûté un raisin comme ça de toute ma vie. »
Ce fruit si familier se transforme en terrain d’exploration sensorielle. Il nous oblige à ralentir, à ouvrir nos sens.
Et c’est là que quelque chose se joue. Lorsque nous faisons en conscience, nous ne vivons plus à côté de notre quotidien, mais dedans, pleinement présents.
Ce que j’observe alors, c’est qu’en réveillant nos sens, nous ouvrons aussi la porte à quelque chose de plus vaste : notre intuition.
Voir, sentir, toucher… pour percevoir autrement
Cette exploration sensorielle m’a menée à réfléchir plus largement à la place des sens dans notre vie. Ce n’est pas un hasard si, dans beaucoup de traditions, le développement spirituel passe par un retour à la sensorialité. Nos cinq sens sont bien plus que des capteurs mécaniques : ce sont des portes vers une perception plus fine, plus subtile, plus intuitive du monde.
Prenons la vue, par exemple. Regarder un objet, un visage, une plante… en conscience, c’est apprendre à ne plus passer rapidement d’un détail à l’autre, mais à voir vraiment.
La lumière, les ombres, les reliefs, les tensions dans les expressions : tout cela devient lisible, pour peu qu’on s’y arrête.
Ce ralentissement, ce regard posé, ouvre déjà une autre forme de relation à ce qui nous entoure.
De là, naturellement, c’est tout le corps qui se réveille. Le toucher, si souvent relégué à l’arrière-plan, devient une boussole. Dans mes pratiques énergétiques, il m’est précieux : c’est souvent par la sensation tactile que l’on perçoit les premières nuances d’un déséquilibre, d’une tension, ou au contraire d’un apaisement.
Et cette conscience du corps, je la redécouvre moi-même en tant qu’élève, grâce à l’approche très fine de ma professeure de yoga. Dans ses cours, chaque posture est déconstruite minutieusement : où est posé le pied ? Quelles zones s’activent ? Quel est le rôle de chaque muscle ? Son enseignement insiste sur le ressenti, et non sur la forme.
Ce travail m’a appris que plus on affine sa perception corporelle, plus on affine aussi son intuition.
L’intuition, prolongement naturel des sens éveillés
Cette écoute du corps, cette attention à l’instant, ouvre un espace intérieur très particulier. Les gestes deviennent plus conscients, les décisions plus alignées.
On capte plus facilement ce qui se joue dans une pièce, dans une relation, dans une atmosphère.
Autrement dit : quand les sens s’éveillent, l’intuition se déploie.
Et cela ne s’arrête pas là. Car ce que nous percevons avec les yeux, les mains, les oreilles ou la langue… est toujours accompagné par un ressenti plus vaste, une lecture silencieuse des situations. Comme si l’intelligence du corps ouvrait un canal de compréhension que les mots n’atteignent pas.
C’est ce que j’aime explorer dans mes soins énergétiques : ce va-et-vient subtil entre perception physique et sensation intérieure. Un frisson sur la peau, une impression diffuse dans le ventre, une chaleur qui se déplace… autant de signes que le corps sait, bien avant que le mental ne l’explique.
Une nouvelle façon d’être en lien
Faire en conscience, c’est donc bien plus que ralentir.
C’est développer un lien plus profond à soi-même, mais aussi aux autres.
Une écoute plus fine. Un regard plus doux. Une qualité de présence qui transforme.
C’est sentir le parfum du café et s’y arrêter quelques secondes. C’est écouter son interlocuteur sans préparer sa réponse. C’est accueillir une émotion corporelle comme une information précieuse.
C’est, en somme, choisir de vivre depuis l’intérieur, et non en surface.
Et vous, quel geste pourriez-vous transformer aujourd’hui, simplement en l’habitant pleinement ?